L’Afrique 50 ans après. Vers une nouvelle indépendance ?
Le « Grand palais » de Lille a accueilli le samedi 24 avril dernier, le forum international sur le cinquantenaire des indépendances des pays africains. Une rencontre organisée par l’Association lilloise Reines des femmes sur le thème «50 ans après les indépendances en Afrique : Quelles perspectives économiques pour les entreprises étrangères ?».
Moment de mémoire, de rénovation, de bilan rétrospectif, d’introspection et de réconciliation. « Reines des Femmes » a invité sous « le soleil des indépendances » africaines à comprendre les forces et les erreurs de ces 50 années d’indépendances afin de mieux appréhender le futur.
« Quelles indépendances célèbre t-on aujourd’hui ? », n’a pas manqué de s’interroger Honorine Ganhoulé la présidente. Et pour cette «Journée africaine », de nombreux intervenants et des thèmes variés ont meublé le programme pour comprendre l’Afrique d’hier, celle d’aujourd’hui et de (mieux) construire ce continent pour demain.
Pour Mme Yao Yao, ambassadeur de la Côte d’Ivoire à l’Unesco, il était important et il était (surtout) temps, de « marquer un arrêt pour faire un bilan sans complaisance».
Devoir de mémoire et civilisation africaine.
« On sait tout sur la manière dont les africains meurent, mais on ne sait pas tout de comment ils vivent ». L’historien Jean Philippe Omotunde en soulevant cette assertion, voulait relever que la relation entre l’Afrique et l’occident n’est pas un problème en soi. Mais plutôt l’étique sous laquelle elle se loge.
«La modernité de la pensée africaine se trouve en Afrique. Et l’Afrique ne doit pas chercher à rattraper l’occident, elle doit chercher à rattraper son propre génie».
Dans le même ordre d’idée, Gaston Kaboré, cinéaste et président du Jury du FESPACO a estimé que «le problème en Afrique c’est que nous avons été rendu aveugle par nous même ». Désormais les regards se tournent vers les jeunes.
«Il faut qu’ils apprennent que ce n’est pas un malheur d’être né en Afrique. Nous sommes capables comme n’importe quel peuple dans le monde de nous prendre en main. Le poison est dans nos têtes. C’est aux Africains de l’en extirper ».
Pour le cinéaste burkinabè, il y a un réel travail de reconquête et de repositionnement à faire. « Nous avons le devoirs de réapprendre à vivre dans notre dignité. C’est long peut être. Mais le seul chemin par lequel il faut passer ».
Les indépendances. Tout a t-il été dit ?
Peut être que non ! C’est ce qu’à tenté de montrer Ama Mazama, linguiste, philosophe et professeur d’études africaines à Temple université, USA. Selon elle, « le pire crime de la colonisation a été la colonisation de l’image de Dieu ». Reprenant la citation de John Henrik Clarke. Le premier asservissement du colonisateur selon Amza, a été religieux. Celui du reniement des croyances africaines au profit d’une croyance extérieure et parfois inadaptée. Une croyance de domination et d’asservissement pour laquelle il fallait abandonner les pratiques traditionnelles.
«Quand on considère que Dieu est blanc, c’est que ses enfants sont par conséquent blancs. De qui les Africains sont-ils les fils ? De satan. Cela engendre un complexe d’infériorité et une perte de foi en nous même. Pour atteindre Dieu, il faut atteindre le blanc ».
«Comment être indépendance si nous continuons à vénérer leur Dieu ?», s’est-elle demandée. Avant de conclure : « le pire crime du colonialisme a été la désacralisation de l’Afrique ». Désormais les Africains ne pourront parler de renaissance que lorsque le sacré sera remis au cœur de la civilisation africaine. Il faut intégrer la spiritualité et le sacré dans cette notion d’indépendance.
Vers l’Afriqu’à fric ?
Le professeur Jean Paul Mbelek, Docteur es Science de l’université Pierre et Marie Curie Paris VI Spécialité astronomie et astrophysique, a rappelé les accords signés entre la France et certains pays africains et qui stipulent que « toutes les richesses africaines sont la propriété exclusive de la France ». Des accords que les gouvernements africains font fi d’ignorer. Jean Paul MBelek a d’ailleurs souligné et démontré avec force que «l’Afrique n’est pas seulement le berceau de l’humanité, mais aussi le berceau des mathématiques ».
« Pourquoi l’Afrique n’exploite t-elle pas elle-même ses propres richesses ?», s’est interrogé l’économiste Nicolas Agbohou. Pour ce spécialiste du franc CFA, l’un des obstacles à l’indépendance économique en Afrique est cette monnaie commune à de nombreux pays africains. Nicolas Agbohou définie d’ailleurs le « CFA » comme la « Colonie Française en Afrique ». Une invention et une propriété de la France.
Cependant, pour s’en défaire il faut l’initiative (courageuse) des Etats africains.
« Il faut couper le « cordon ombilicale économique entre les grandes puissances et les pays Africains. Créer la monnaie économique africaine et transformer nous-mêmes nos matières premières. Il faut écrire dans la constitution, l’obligation de transformer toutes les matières premières sur place».
Seulement, les Africains sont-ils suffisamment conscient de cet état de fait ? Les dirigeants africains sont-ils prêts à privilégier le développement de leurs pays au détriment de leurs intérêts personnels ? C’est un combat (d’une grande envergure) qu’il faudra certainement mener. Dictature, ‘’démocraticidie’’ et corruption. Voici d’autres batailles à mener à l’intérieur de notre continent. Tout le reste en dépend peut être.
Finalement, les Africains ont compris que leur avenir dépend d’eux-mêmes et du discernement qu’ils mettront dans leurs nouvelles relations avec l’Occident. Cela demande une prise de conscience, et une prise décision à vouloir développer les Etats, dans la démocratie, la paix et la stabilité. Tout cela semble tellement loin, mais tellement possible.
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